Une proposition d’ordonnance relative à l’inclusion de clauses environnementales et éthiques dans les marchés publics vient d'être déposée au Parlement bruxellois.

 

En deux mots 

  • Pourquoi ? Les marchés publics représentent une manne financière colossale. Or nous sommes dans une situation de crise sociale, économique et environnementale, il faut donc réorienter l'économie
  • Comment ? Par l’inclusion de clauses sociale et environnementale dans les marchés publics
  • Qui ? La Région, les OIP, les communes et les autres autorités qui bénéficient du financement régional
  • Comment ?  Il y aura 3 clauses: une environnementale, une concernant les cycles de vie et une éthique
  • Progressivité ? Il y aura 4 niveaux: du 0 (pas de clause) au niveau 4 (exigences maximales) pour permettre une progressivité
  • Evaluation ? Un monitoring sera prévu pour évaluer cette mesure en permanence
  • Accompagnement ? Un accompagnement est prévu pour aider les acteurs concernés à s'adapter


A l’échelle européenne, les marchés publics représentent pas moins de 1800 milliards d’euros, soit 16% du Produit Intérieur Brut de l’Union européenne. C’est dire le levier que représentent les marchés publics pour influencer le comportement des entreprises et favoriser de nouveaux comportements.

 

En parallèle, nos sociétés sont confrontées à de multiples défis environnementaux, qu’il s’agisse par exemple des changements climatiques, de la perte de biodiversité ou de l’épuisement de certaines ressources.

 

Face à ces urgences environnementales, et au travers des marchés publics, les pouvoirs publics ont ainsi non seulement l’occasion mais aussi l’obligation d’exercer leur pouvoir d’achat de manière réfléchie et écologiquement responsable.

 

La circulaire régionale du 5 février 2009 relative aux achats publics durables était un premier pas dans ce sens. Il ressort de l’expérience de la mise en œuvre de ce texte qu’une circulaire n’est pas un instrument suffisamment adéquat pour assurer la durabilité des marchés publics.A défaut de valeur réglementaire, elle n’offre pas le complément de base légale souhaité pour l’inclusion de certains types de clauses environnementales ou sociales.

 

Objectifs de la proposition d’ordonnance

 

  • Offrir une base légale permettant d’uniformiser et de développer les pratiques durables en matière d’achats publics ;

 

  • Imposer progressivement aux pouvoirs adjudicateurs bruxellois l’inclusion de clauses environnementales et éthiques dans leurs marchés publics d’importance ;

 

  • Parmi les clauses environnementales, prévoir une clause visant à prendre en compte les coûts du cycle de vie de l’objet du marché[1] ;

Institutions visées

Au sein des pouvoirs adjudicateurs visés, deux catégories peuvent être distinguées :

 

§         la Région elle-même et des organismes régionaux « consolidés » (p.ex. Actiris, ABP, ABE, STIB, IBGE,…). Les communes y sont assimilées.

 

§         Les autres autorités et organismes qui présentent une plus grande autonomie par rapport à la Région. L’ordonnance ne s’imposera à ceux-ci que pour les marchés faisant l’objet d’un soutien financier régional spécifique.

 

En outre, lors de chaque renouvellement du contrat de gestion avec un pouvoir adjudicateur, le Gouvernement y définit des objectifs et une stratégie en rapport avec les clauses environnementales, coût du cycle de vie et éthiques dans les marchés publics pour lesquels l’organisme est pouvoir adjudicateur. Il y prévoit un bonus financier dont le montant est fonction du respect par l’organisme des objectifs susvisés, dans les limites des budgets disponibles.

 

Modalités

  • 3 types de clauses :
    •  
      • « clauses environnementales » : poursuivent un objectif de préservation de l’environnement par l’optimisation de l’impact environnemental de l’exécution du marché public ;

 

  •  
    •  
      •  « clauses coût du cycle de vie » : clauses environnementales visant la prise en compte de l’ensemble des coûts différés à charge du pouvoir adjudicateur intervenant tout au long de la durée d’usage de l’investissement ;

 

  •  
    •  
      • « clauses éthiques » : poursuivent un objectif de respect des droits fondamentaux des personnes, d’équité sociale et, notamment, d’équité dans le commerce.

 

  • Marchés visés : l’ordonnance vise les marchés publics de fournitures, de services et de travaux, de plus de 22.000 EUR (HTVA). Pour les pouvoirs adjudicateurs présentant une plus forte autonomie vis-à-vis de la Région, l’inscription de clauses n’est requise que lorsque l’objet du marché fait l’objet d’un subside régional à hauteur de 10% au moins du montant estimé du marché.

 

  • Progressivité dans les niveaux d’exigences environnementales : Les niveaux de référence pour la qualification des exigences environnementales sont au nombre de quatre et vont d’une passation sans stipulation environnementale (niveau 0) à une passation intégrant les meilleures pratiques environnementales en vigueur au moment de la passation du marché (niveau 3).

 

  • Progressivité dans la mise en œuvre de l’obligation de rédaction des clauses environnementales et éthiques. L’ordonnance propose des objectifs chiffrés pour une première période 2014-2016, à savoir :

 

  •  
    •  
      • 20% au moins du volume financier des marchés et 20% au moins de ces marchés intègrent des clauses environnementales (de niveau 2 ou 3) ;

 

  •  
    •  
      • 30% au moins du volume financier des marchés et 30% au moins de ces marchés sont affectés de clauses coût du cycle de vie pour autant que ce coût est susceptible d’atteindre 10% du montant total du marché ;

 

  •  
    •  
      • 30% du volume financier des marchés et 30% au moins de ces marchés sont affectés de clauses éthiques, en ne prenant en considération que les marchés qui s’y prêtent.

 

Au terme de cette première période, le Gouvernement pourra, le cas échéant, revoir à la hausse ces objectifs, par triennats successifs.

  • Monitoring, évaluation et contrôle : un tableau de bord des marchés publics sera tenu par les pouvoirs adjudicateurs. Son premier objectif est d’accroître leur maîtrise sur leurs marchés, en leur offrant une vue d’ensemble sur leur propre pratique et ses effets. Dans ce tableau de bord, ils procéderont eux-mêmes à une évaluation des clauses environnementales auxquels ils auront eu recours. Une évaluation triennale par le service régional désigné à ce effet – au rythme de la redéfinition des objectifs régionaux – se fondra notamment sur les tableaux de bord tenus par les adjudicateurs.

 

  • Accompagnement : Pour faciliter l’entrée des pouvoirs adjudicateurs dans la dynamique proposée, l’ordonnance prévoit différents outils et moyens. Parmi ceux-ci, on mentionnera d’abord la personne-ressource à désigner au sein de chaque pouvoir adjudicateur. Cette personne de référence bénéficiera d’une formation continue. Comme aujourd’hui, un helpdesk régional se tiendra à disposition des pouvoirs adjudicateurs pour les épauler dans la mise en œuvre de clauses environnementales et éthiques adaptées. Des clauses modèles continueront d’être développées par la Région, laquelle s’inspirera de tout ce qui a déjà été développé aux niveaux fédéral et européen. Les centrales de marchés sont également favorisées par l’ordonnance, au titre de moyens.

 

 

Arnaud Pinxteren

Député bruxellois



[1] La prise en compte des « coûts différés à charge du pouvoir adjudicateur intervenant tout au long de la durée d’usage de l’investissement » a, si pas toujours, très souvent une incidence environnementale. C’est ainsi qu’il en est largement question dans le manuel « Acheter vert ! Un manuel sur les marchés publics écologiques » de la Commission européenne.

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