Les emplois sous-qualifiés ne profitent pas aux Bruxellois
16 nov. 2011Un tiers des offres envoyées
en dehors de Bruxelles
n’exigent aucun diplôme.
C’est l’un des grands paradoxes de
Bruxelles. Si la Région-Capitale
est un formidable pourvoyeur
d’emploi (plus de 700000 postes), elle
est également la Région qui connaît le
taux de chômage le plus important (plus
de 20%). Seuls la moitié des emplois à
Bruxelles profitent ainsi à des Bruxellois.
La théorie officielle explique cet état de
fait par l’inadéquation entre une forte
population (souvent jeune) dite “sousqualifiée”
à Bruxelles et un marché où
abondent des emplois pour candidats
“surdiplômés”. Or les chiffres viennent
tordre le coup à cette explication.Depuis
plusieurs années, les agences régionales
Actiris (Bruxelles), le Forem(Wallonie) et
le VDAB (Flandre) échangent des offres
d’emplois entre elles. L’échange se fait
sur la base de quatre critères: l’offre concerne
des fonctions critiques, c’est-à-dire
en pénurie dans la Région, elle est
ouverte depuis plus de 40 jours calendrier
sans être pourvue, elle a comme
lieu de travail une adresse dans une autre
région ou elle est difficile à satisfaire. Actiris
envoie ainsi chaque année des milliers
d’offres d’emploi vers la Flandre et
laWallonie, faute de trouver le candidat
idéal à Bruxelles.Or, il est interpellant de
constater que plus de 38% de ses offres
(5500 vers la Flandre et laWallonie) envoyées
par l’agence régionale bruxelloise
ne requièrent aucun diplôme particulier.
Les emplois pour personnes sous-qualifiées
ne manquent donc pas dans la capitale…
“Il y a un gros souci, remarque le député
régional Arnaud Pinxteren (Ecolo).
Je n’ai rien contre le fait que ce soient des
Wallons ou des Flamands qui remplissent
ces fonctions. Tant mieux pour eux. Mais
comment expliquer qu’Actiris n’arrive pas
à trouver des candidats bruxellois?” Selon
le député écolo, d’autres raisons peuvent
expliquer cette “anomalie”, comme la
précarité des emplois proposés (“ils sont
peut-être si peu intéressants qu’ils ne trouvent
pas preneurs”) ou la discrimination à
l’embauche. “Il faut creuser la question et y
remédier au plus vite.”
Autre grief de l’élu vert: Actiris est incapable
d’identifier le nombre de
Bruxellois qui ont été engagés par le
biais des 115000 offres d’emploi reçues
en 2010 par le Forem et le VDAB. “Il
n’existe aucun suivi. Il faut que cela change
et qu’on puisse connaître exactement le
parcours d’un demandeur d’emploi”,
poursuit Arnaud Pinxteren. Les chiffres
du SPF Economie sont plus précis et
parlent de 61140 Bruxellois qui font
chaque jour la navette vers la Flandre et
la Wallonie (auxquels il convient
d’ajouter les 4750 Bruxellois qui travaillent
à l’étranger). Proportionnellement,
les Bruxellois sont donc les plus
mobiles du pays, puisque près d’un actif
sur sept travaille en dehors des frontières
de la capitale. “Cette navette sortante
est en constante progression, surtout vers
la Flandre. On peut donc supposer que le
bilinguisme est en hausse chez les demandeurs
d’emploi bruxellois, s’avance
M. Pinxteren. De quoi mettre à mal le cliché
du jeune bruxellois désoeuvré qui attend
un emploi en se croisant les bras.”
R.Me.
La Libre – 16 novembre 2011